A l’aune de l’incroyable trajectoire artistique qu’elles inaugurent, les après-midi que Louise Bourgeois (1911-2010) passait à dessiner dans l’atelier de tapisserie de la maison familiale à Choisy apparaissent comme sa véritable naissance.
Après un bref passage à l’école des Beaux-arts en 1932, elle multiplie les formations dans les académies libres de Paris : d’abord à la Grande-Chaumière - fondée en 1870 par le sculpteur italien Filippo Colarossi - puis à l’Académie Ranson, véritable repère pour les peintres Nabis à partir de 1908, et enfin à la célèbre Académie Julian avant d’entamer un cursus à l’École du Louvre à partir de 1936.
L’enseignement qu’elle y reçoit est classique, comme en témoigne les études aux fusains de La Vénus de Milo et d'Antinous, que la maison PIASA adjugea le 3 Juin 2015 respectivement 5 104 euros et 6 380 euros.
En parallèle des formations qu’elle suit, Louise Bourgeois fréquente des ateliers d’artistes, parmi lesquels celui de André Lhote, de Fernand Léger et – lors de séjours dans le sud de la France – d’un Pierre Bonnard vieillissant.
Louise Bourgeois (1911-2010) Eyes, 1992
Estimate : 40000 / 60000 €
En 1937, sa rencontre avec l'historien d'art américain Robert Goldwater précipite son destin. Elle quitte la France à ses côtés et s’installe, l’année suivante, à New-York où elle fréquente la diaspora des Surréalistes qui, dans le sillage de Marcel Duchamp, s’y sont établit.
« Eyes », la pièce que PIASA propose à la vente le 26 septembre 2019, réalisée à l’aquarelle et à la gouache, date de 1992. Elle est signée par les initiales de l’artiste « LB » en bas à droite.
Les thèmes de la vision et du regard sont récurrents dans le travail de Louise Bourgeois, notamment à partir des années 1980. Le motif des yeux se retrouve par exemple dans des installations, comme « Nature Study Velvet Eyes » (1984) conservée dans la collection de la Galerie Lelong à Zurich ou dans la version réalisée dix ans plus tard « Cell (Eyes and Mirrors) », présenté à la Tate Gallery.
Motif ô combien symbolique, l’œil matérialise - dans le vocabulaire d’une artiste marquée par la pratique de la psychanalyse - l’imbrication très forte en Occident entre la vue, le savoir et le pouvoir.
Concomitamment avec le développement des thèmes de la féminité, de la sexualité et de la famille, les années 1970 sont celles des premiers succès publics de l’artiste. Ceux-ci culmineront avec sa première rétrospective au MoMA en 1982-1983 et, plus récemment, avec l’exposition de plus de 200 œuvres, magistralement orchestrée par le Musée national d’art moderne en partenariat avec la Tate (2008).
