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Wilson Tibério : les muses combattantes

1 mai 2022

Le 11 mai 2022, dans le cadre de sa vente Afrique + Art moderne et contemporain, PIASA présentera aux collectionneurs deux oeuvres de l’artiste brésilien Wilson Tibério.

« Quelques fois, on dit ‘non!’ Cela, c’est l’artiste noir qui le dit. Alors une nouvelle forme d’art apparaît : l’art de combat. Art de transition pour une période de transition. Art du présent, entre une grandeur perdue et une autre à conquérir. » 

Ce sont ces mots, d’une rare puissance, qui accompagnent l’apparition furtive de l’artiste brésilien Wilson Tibério dans le film iconique d’Alain Resnais et de Chris Marker Les statues meurent aussi (1953), une commande de la revue Présence Africaine. Dans cette séquence on voit l’artiste peindre avec détermination une toile représentant des hommes noirs brisant les chaînes qui les retiennent aux poignets, le visage marqué par une expression triomphante. La concentration de Tibério et son engagement sur le sujet qu’il peint sont palpables. 

Un des premiers peintres noirs reconnus dans sa patrie natale, élevé dans une famille dure où l’art représente un échappatoire nécessaire, Wilson Tibério se fait remarquer rapidement pour ses talents de peintre. Dès 1947, il est invité en France et se rend dès les années 1960s au Sénégal, où il rencontrera le Président Senghor, et où il exposera quelques années plus tard, avec le peintre sudafricain Gérard Sékoto. Son travail est présent dans les plus importantes collections institutionnelles au Brésil et à l’étranger.


Wilson Tiberio
Le porteur, 1944
Estimation : 4 000 / 6 000 €


Les deux toiles exposées ici proviennent d’une collection privée brésilienne de mécènes de l’artiste, et ont été conservées dans la même famille depuis les années 1940s. Elles dépeignent deux scènes de la vie quotidienne à Bahia, la « capitale noire du Brésil », et illustrent déjà l’engagement de Tibério pour la cause noire et les sujets de société, plusieurs années avant son arrivée à Paris et la confrontation inévitable qui s’y produira avec les questions de décolonisation portées par les intellectuels africains, avec lesquels il liera immédiatement et jusqu’à sa mort, une amitié profonde. 

Le « Non » de Tibério se retrouve, comme un fil rouge, dans le travail de nombreux artistes lusophones et hispanophones du continent et de sa diaspora. Des Agudas au Brésil en passant par l’Angola, et jusqu’à Cuba et le Chili, le travail de ces artistes porte la question politique comme un précieux patrimoine. 


Wilson Tiberio
Scène de marché (Bahia), 1944
Estimation : 5 000 / 7 000 €


Le surréalisme d’un Manuel Mendive et les références dissimulées dans sa peinture aux rites initiatiques ramenés d’Afrique, sujet qui le passionnait comme avant lui son compatriote Wifredo Lam, est un acte de défiance envers le conservatisme catholique des maîtres d’esclaves; plus près de nous, Alfredo Jaar, dans la touchante vidéo Embrace, traite avec dignité et sobriété du difficile sujet du génocide rwandais, qui fait écho dans son histoire personnelle, aux sombres heures de la dictature dans son propre pays. Kiluanji Kia Henda explore dans The Geometric Ballad of Fear, la beauté paradoxale des grilles de protection en fer forgé, destinées à protéger les résidences des cambrioleurs. On lit entre les lignes, le sujet de l’instabilité entretenue dans la région par des forces intérieures et extérieures, soucieuses de maintenir leur mainmise sur les ressources naturelles au détriment du bien-être des populations.

Si la première partie du cri de ralliement célèbre « A luta continua » est bien connu, la suite de cette phrase, pourtant tout aussi importante, l’est moins: « A vittoria è certa. » C’est cette idée de confiance en l’avenir, une victoire inéluctable, prophétique, que l’on retrouve dans le travail des angolaises Ana Silva et Keyezua. Leurs personnages, traités avec la tendresse du textile ou magnifiés par la théâtralité que permet la photographie, font face sereinement, à un avenir certain. 

La valeur de ces trois muses combattantes : l’Afrique, Bahia et Cuba, nous porte nous aussi, à croire à cet avenir




Vente associée

Afrique + Art Moderne et Contemporain

Paris mercredi 11 mai 17:00 Voir les lots

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