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Francis Bacon : potentialités et tensions du triptyque

17 décembre 2021

La maison PIASA organise le mardi 21 décembre une vente entièrement dédiée aux éditions ; estampes, livres illustrés et autres œuvres multiples. Le catalogue de cette vacation se compose notamment de deux triptyques, rares, de Francis Bacon.

De tous les peintres contemporains, Francis Bacon est peut être celui qui a exploité avec le plus de force les potentialités et les tensions inhérentes au triptyque.

Hérité des retables du Moyen-Age, ce mode de composition tripartite s’impose au XVIe s. comme l’expression dominante du genre, préférence qui perdurera pendant toute la période baroque. Son apogée – qui est aussi son chant du cygne – est atteint par L’Érection de La Croix de Pierre Paul Rubens (1610-1611), chef d’œuvre aujourd’hui exposé dans la cathédrale d’Anvers et avec lequel certaines œuvres de Bacon entrent en résonance.

Fin connaisseur de la peinture baroque, Bacon saisit très vite la leçon des Maîtres Anciens quant au pouvoir du format multiple. Il l’utilise donc à de nombreuses reprises tout en proposant une approche diamétralement opposée. En effet, le triptyque n’est plus avec Bacon une narration défilante, à l’instar d’une gigantesque peinture de chevalet mais bien trois espaces clos. En valorisant le vide entre les panneaux, il brouille les pistes et rend moins explicite le rapport logique entre eux. Il interroge le spectateur sur les liens qui unissent les différentes parties de l’œuvre sans pour autant les rendre hermétiques l’une à l’autre.

Francis Bacon (1909-1992)
Triptyque - août 1972

Suite complète de trois lithographies sur papier vélin Arches

Estimation : 18 000 / 25 000 € 


Car chez Bacon, si le cadre isole, il ne sépare jamais totalement. Cette subtilité se retrouve dans beaucoup de ses œuvres et notamment dans Triptych - août 1972, qui explore de manière magistrale l’interdépendance qui existe toujours entre le vide et le plein. Réalisée à une période sombre de sa vie, elle fait partie de la série appelée The Black Triptychs, débutée en 1971. Quelques mois plus tôt, son amant, George Dyer, s'est suicidé dans l'hôtel des Saints-Pères à Paris, l'avant-veille de la rétrospective de l'artiste au Grand Palais et bien qu'il doive vivre encore dix-sept ans, il a le sentiment que son existence est presque terminée, "et que tous les gens [qu’il a aimés] sont morts".



Francis Bacon,
L'Orestie d'Eschyle - 1981

Lithographie sur papier vélin Arches

Estimation : 8 000 / 12 000 €


Son inquiétude se reflète dans les carnations foncées ou encore dans la figure de Dyer, traquée par une large ombre, qui prend la forme de flaques de sang ou de chair, proposition que l’on retrouve également dans In Memory of George Dyer (1971) et Triptych, May-June 1973, deux autres Black Triptychs. Bacon y met en scène la tension du vide, du néant proche, suggérée par un certain nombre de repères plastiques : la forme d'une porte monochrome au centre de chacun des panneaux, des murs peu profonds, des aplats sombres en arrière-plan.


Francis Bacon,
Triptych - 1983
Suite complète de trois lithographies sur papier vélin Arches
Estimation : 18 000 / 25 000 €


Bacon ne s'est jamais remis du suicide de Dyer et son œuvre restera hantée par la conscience de la perte, de la mort et des effets du passage du temps. Il admettra plus tard que "... bien que l'on ne soit jamais exorcisé, car les gens disent que l'on oublie la mort... ce n'est pas le cas... le temps ne guérit pas. Mais vous vous concentrez sur quelque chose qui était une obsession, et ce que vous auriez mis dans votre obsession, vous le mettez dans le travail".

Vente associée

Estampes, multiples et livres illustrés

Paris mardi 21 déc. 17:00 Voir les lots

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