Le pogrom de Lasi perpétré en 1941 par une Roumanie alliée de l’Axe, fait disparaître le père de l’artiste et pousse sa famille sur les routes de l’exil. A travers les montagnes des Balkans, elles les menèrent en Suisse. C’est en effet à Zurich que celui qui s’appelait avant-guerre Daniel Isaak Feinstein est recueilli par son oncle maternel, le professeur de littérature Théophil Spoerri (1980-1974).
A l’école de danse de l’Opéra de Zurich, puis au côté de la danseuse Olga Preobrajenska (1871-1962), c’est à la confluence de la danse, du mime et du théâtre que le jeune Daniel Spoerri passe ses premières années.
Peu de temps après son installation à Paris en 1959, il crée les éditions « MAT » (Multiplication d’Art Transformable) et organise à la galerie Edouard (sise rue de Rennes), sa première exposition. L’idée était de réaliser des éditions originales d’objets principalement cinétiques qui encourageaient l'intervention du spectateur. Multipliées jusqu’à cent exemplaires, elles étaient numérotées et signées par l’artiste.
Parmi les artistes qui y contribuèrent on retrouve Marcel Duchamp, Jean Tinguely que Daniel Spoerri rencontra dès 1949 à Bâle, mais encore Victor Vasarely, Hans Arp ou Christo.
Daniel Spoerri (né en 1930) Détrompe l'œil, le cheval évadé, 1986
Estimation : 25000 / 35000 €
Il invente en 1960 ses premiers « tableaux-pièges » en collant sur des planches des objets du quotidien ramassés dans sa chambre d'hôtel. Le passage entre l’horizontalité et la verticalité conférait à ces objets une présence insolite. Ce travail le conduit à rejoindre le groupe des Nouveaux réalistes lors de sa fondation en 1960.
A partir de 1963, dans une démarche visant à transfigurer la banalité d’un réel que le spectateur ne parvient plus à regarder comme il se doit, il crée ce qu’il nomme des « Détrompe-l'œil ». Dans ces assemblages hétéroclites, l’artiste intègre des objets du quotidien.
De l'île grecque de Symi en 1967 au parc du Montcel à Jouy-en-Josas en 1987 en collaboration avec des artistes comme César, Arman, Pierre Soulages ou encore Jean-Pierre Raynaud, Daniel Spoerri multiplia les performances artistiques.
Datée de 1986, « Détrompe l'œil, le cheval évadé » est emblématique du travail de l’artiste. Sur une toile peinte marouflée sur panneau de bois représentant un paysage champêtre une lampe et la silhouette d’un cheval ont été collées. La juxtaposition entre la profondeur feinte du tableau et l’exacerbation de la surface crée une trouble dans l’œil du spectateur et interroge les frontières de la notion de créativité.
