« Souleymane Keïta, l’un des meilleurs peintres de sa génération a su se montrer digne héritier de son aîné (Iba Ndiaye). Ses oeuvres récentes ont fini de convaincre de la maîtrise technique d’un créateur qui refuse toute concession à la facilité. Mieux, son regard sur le monde, dépouillé de toute fioriture, a débouché sur le symbolisme du signe, clé du langage universel. »
- Coura Thiam Ba, Ministre de la Culture du Sénégal S. Sankalé, B. Breytenbach, Souleymane Keïta, Sepia-Neas, Paris, 1994.
“J’ai travaillé pendant une bonne période en faisant ce que l’on a appelé à un moment donné, le “support-surface”, mais je ne savais pas que je faisais du “support-surface”. Il a fallu l’exposition de Soulages au Sénégal pour que je me rende compte que j’avais les mêmes outils et les mêmes techniques de travail. Par exemple, je travaillais par terre, comme lui. En fait, j’avais les mêmes soucis esthétiques que ces artistes; j’avais à l’époque, dix-sept, dix-huit ans.

Souleymane Keïta (1947-2014, Sénégal)
Sans titre, 1994
Estimations : 6000 / 8000 €
Par la suite, j’ai eu énormément de difficultés parce que les artistes qui peignaient à l’époque au Sénégal, avaient une certaine écriture. Je veux parler par exemple de Ibra Tall, Ibou Diouf, Bocar Diongue, Ousmane Faye. Si l’on ne peignait pas avec le même état d’esprit, on n’était pas considéré dans le “circuit” des artistes peintres sénégalais. J’ai commencé à faire des concessions, à faire de la peinture symbolique, à introduire des figures, etc. Au bout de quelques années, je me suis lassé de cela, parce que je me suis rendu compte que ce n’était pas du tout ma voie et c’est ainsi que j’ai commencé l’aquarelle. (...) J’ai commencé à travailler plus intensément; la plus grande partie de ma production était de l’aquarelle. Et voilà! J’ai suivi ma route petit à petit. J’ai commencé à voyager, à rencontrer d’autres artistes, dans d’autres pays africains.
Dans les années 1975/76, j’ai fait un séjour aux Etats-Unis, qui m’a fait énormément de bien parce que là-bas j’ai rencontré des artistes qui avaient les mêmes soucis que moi: des Afro-Américains, des artistes de la diaspora, peintres, sculpteurs, musiciens, etc.
Cette période fut aussi très importante parce que c’est là-bas que j’ai développé cette série que j’ai appelée “Le voyage au Mali, de Dakar à Bamako”. Pendant les cinq années que j’ai passées dans la ville de New York, je n’ai travaillé que sur cette série.
(...)

Souleymane Keïta (1947-2014, Sénégal)
Sans titre, 2002
Estimations : 7000 / 9000 €
Ce n’est que très récemment, peut-être inconsciemment, à force de voyager (...), que j’en suis venu dans ma peinture à revendiquer une chose que je n’avais jamais revendiquée auparavant - je ne pensais jamais qu’un jour j’arriverais à cette étape -, cette chose c’est ma négritude.
Le résultat de cette prise de conscience, c’est ce que tu es en train de voir autour de moi."
Souleymane Keïta à Sylvain Sankalé. S. Sankalé, B. Breytenbach, Souleymane Keïta, Sepia-Neas, Paris, 1994.