Le 24 novembre 2021, la maison PIASA présentera sa seconde vacation de l’année dédiée à l’Afrique et aux scènes lui étant liées. Cette vente sera composée de plusieurs sections : la première présentera des œuvres issues de la collection de Maine Durieu, collectionneuse, galeriste et artiste décédée en 2015.
"J’ai eu cette chance, quarante ans après l’avoir rencontrée à Paris au début des années 70, d’être devenu son ami, presque son frère.
Grand Jacques, son mari, construisait des routes en Afrique de l’Ouest. Maine parcourait les pistes, passionnée par l’art, à la recherche d’objets par plaisir d’abord, par passion ensuite, pour finalement en faire son métier en gardant toujours le plaisir et la passion.
Elle aura plusieurs galeries à Paris dont la très célèbre du Quai des Grands-Augustins et la dernière, rue Visconti. Ces années seront illuminées par de superbes expositions faisant découvrir la richesse des ethnies ivoiriennes et la culture Gan du Burkina Faso dont elle exposera un vrai trésor constitué de somptueuses cloches rituelles en bronze dont les patines allaient, chose rare en Afrique, du vert antique jusqu’à une cristallisation azurée.
Maine avait des jardins réservés. Parmi ceux-ci, sa fille Laurence et ses trois petits-enfants, sa collection de tableaux et la maison improbable, inattendue, construite sur une colline à Banfora en face des contreforts du Mali, surplombant une vallée couverte de cannes à sucre, avec comme seul voisin un petit village dont le chef Issouf assurait la protection. J’y suis allé trois fois et les perdrix et les crocodiles chassés donnaient lieu à des festins dignes de romans. Un endroit d’exception pour une femme exceptionnelle !
Pilipili Mulongoy (1914-2007, Congo)
Sans titre (Poissons sur fond turquoise)
Estimation : 4 000 / 6 000 €
La collection présentée ici est une véritable carte factorielle de celle qui était Germaine Durieu. Son choix de collectionner ces tableaux pendant plus de 40 ans est vraiment l’expression de sa personnalité profonde, de sa vision, de sa délicatesse, de son non conformisme. Maine ne suivait pas les sentiers battus, faciles… Elle innovait constamment.
Nièce de Germaine Richier, elle était aussi une artiste, à sa manière. Après avoir vécu à Niamey, à Cotonou, à Kinshasa, Maine s’installe à Abidjan en 1976. Elle s’inscrit aux Beaux-Arts section peinture, a comme professeur Serge Hélénon. Ses camarades d’atelier s’appellent Koudougnon, Tina Meledge, Kra, Yacouba. Parallèlement, elle ouvre une première galerie d’arts africains anciens dans la capitale ivoirienne. Dès lors, elle ne cessera d’exposer également des peintres contemporains dans ses différentes adresses, rue du Commerce à Abidjan, puis à Paris.
À la fin des années 1970, elle rencontre Zéphirin, un jeune peintre génial, autodidacte, avec qui elle partage la grande paillote atelier qui jouxtait sa maison de Cocody, sur la Corniche, surplombant la lagune Ébrié et le quartier du Plateau. Une large paillotte au toit pointu où tous deux peignent. Laurence se souvient que chaque matin, Zéphirin arrivait de son quartier d’Adjamé, impeccablement vêtu d’une chemise à large col, vous enlaçant de ses grands bras, le visage barré d’un immense sourire, le regard toujours rieur.
Losseni (1959-2009, Côte d'Ivoire)
Sans titre
Estimation : 1000 / 1 500 €
Avec son langage direct, spontané, rythmé, sonore, Zéphirin est pourtant sourd de naissance, il entend, écoute avec ses yeux. Fasciné par la ville, il peint Abidjan dans toute sa lumière, son énergie, sa violence. Zéphirin, poète, peintre du quotidien de la rue. Sous son pinceau, sa liberté est totale. Maine lui achète toiles, dessins, l’expose régulièrement.
Peintre, collectionneuse, galeriste, elle aime porter le travail des autres artistes, tels Losseni, passé par le « Centre de peinture Charles Bieth », créé en 1969 par Charles et Marguerite Bieth qui accueillait des jeunes déscolarisés et handicapés à Abengourou, dans l'Est de la Côte d'Ivoire ; les peintres de Lubumbashi, Mwenze, Pili Pili et Bela en 1992 ; Serge Hélénon et Louis Laouchez de l’École Négro Caraïbes en 1996 ; Aboudramane Doumbouya et Franck Lundangui dès 1999.
Son regard lumineux et pétillant, son sourire éclatant, disparurent soudainement en 2015, nous privant d’une grande dame, amoureuse de la liberté."
Pierre Loos —
Albert Lubaki (1895-?, Congo)
Sans titre, vers 1930s
Estimation : 15 000 / 20 000 €

