A l’occasion de sa prochaine vacation de Design Italien, le 5 novembre prochain, la maison PIASA met en lumière le travail du designer prodiges italien Angelo Lelli et sa société Arredoluce, en proposant à la vente toute une collection de lampes.
En parcourant cette collection de lampes que nous connaissons bien depuis le début des années 2000, et qui a contribué grandement à nos recherches sur les créations d’Arredoluce, nous pouvons nous demander pourquoi les luminaires réalisés à Monza par Angelo Lelii sont aujourd’hui des objets si convoités, avec une tendance de croissance constante, consolidant ainsi leur marché sur le long terme.
Incontestablement, l’attrait que le design et la lumière italienne de la seconde moitié du XXe siècle exercent est certainement dû à des facteurs historiques, artistiques et techniques ; fondements du “Made in Italy”. L’archéologie moderne a déterré de nombreux noms appartenant à la culture du design, développés notamment dans la région milanaise d’après-guerre. Des noms et des histoires qui n’ont pas échappé à la curiosité des marchands et amateurs internationaux, pionniers quant à cette typologie d’objets.
Angelo Lelii (1915-1987)
Model n°12736
Estimation : 8000 / 12000 €
Arredoluce est un cas typique de l'entreprenariat italien de l’après-guerre : instinct, compétence, ingéniosité et justesse, un entrepreneur / designer capable de fonder une création nouvelle, comme pour O-Luce et Arteluce pour ne citer qu’eux. Cela a commencé dans des sous-sols et des laboratoires improvisés, à fabriquer le nécessaire du quotidien, c’est-à-dire tout.
Ces usines, dotées de talents, ont vu l’arrivée d’autres designers. Le cas italien est finalement plutôt particulier : il s’agissait d’une classe éclairée de designers et d’architectes, historiquement attachée au monde des commandes privées, qui s’est mis au service de la production en série. Interagissant directement avec le producteur et le commanditaire pour créer une nouvelle façon de concevoir, l’art décoratif était définitivement devenu un art industriel. Se sont ainsi créés des groupes d’influences culturelles et artistiques, une élite du centre Milanais qui tendait davantage à exclure qu’à inclure. Le magazine Domus a même défini certaines lampes d’Arredoluce comme “le fruit de créations spontanées”, sous-entendant qu’il n’y avait pas de design académique reconnu à leur origine.
Franco Giovanni Legler (né en 1922) Movalux
Estimation : 15000 / 20000 €
Arredoluce, parmi les autres grands, était le plus effacé au niveau de la communication, et Lelii évitait l’entresoi intellectuel. Le marché étriqué de Monza et Brianza a alors répondu avec défiance à ce type de production, définie en interne comme “moderne”, et qui correspond substantiellement à l’Arredoluce que nous connaissons et apprécions aujourd’hui. Un ensemble de facteurs qui ont sûrement déclenché un sentiment de vengeance, poussant Lino (surnom de Lelii) à s’adresser non seulement à l’Italie, mais aussi aux marchés étrangers.
Cela poussa le créateur dans une quête constante de recherche de la perfection. D’où cette volonté spasmodique d’étonner de part sa technique et de se démarquer en refusant les codes préétablis. Chaque lampe est une exception, l’économie d’échelle et la norme ne faisant pas partie de la mentalité d’Angelo. Même les modèles à grand succès doivent répondre à des besoins précis d’artisanat. Presque tout est produit en interne, y compris les plus petites vis, que l’on peut facilement trouver dans le commerce. Lelii lui-même les contrôle une à une.
Angelo Lelii (1915-1987) Floor lamp
Estimation : 8000 / 12000 €
Le sens de la proportion dans les dessins de Lelii est l’essence même des années 1950. Les modèles iconiques qui en sont nés sont les archétypes d’une époque (le Triennale et le Cobra en premier lieu), les intuitions mécanistes précèdent les modèles ensuite portés à grand succès par d’autres (le Filosfera, qui anticipe le Parentesi de Flos). Dans ces lampes se ressentent les influences de l’art cinétique et abstrait, des machines de Calder et du spatialisme. Angelo Lelii voyage et s’inspire. Il obtient des commandes prestigieuses et apporte les meilleurs à son atelier, de Gio Ponti à Ettore Sottsass, d’Achille Castiglioni à Nanda Vigo ; tous admirant ses compétences exécutives et sa vision de la lumière comme art technologique.
La collection ici présentée à ce mérite de représenter un patrimoine de la civilisation de la construction que nous nous engageons à protéger et à diffuser et qui, nous en sommes certains, restera une figure de référence pour définir l’environnement domestique de l’âge d’or de la modernité.
Alessandro Padoan , Archivio Storico Arredoluce
