Sans doute l’un des artistes français à s’être approcher le plus proche de l’esthétique Pop Art, Alain Jacquet est parvenu à faire siennes les images glanées dans l’immense répertoire iconographique que l’histoire de l’art lui mettait à sa disposition. Dans le cadre d’une des vacations consacrées à la collection du marchand Daniel Varenne, la maison de vente PIASA a eu l’occasion cette année de mettre à l’honneur cet artiste, décédé en 2008 à New-York à l’âge de 69 ans.
Sa trajectoire artistique commence à la fin des années 1950 tandis qu’il s’inscrit à l’École des Beaux-Arts de Paris pour suivre des cours d’architecture. Il y fait la rencontre du poète John Ashbery qui le présente à ses amis américains. C’est également à cette époque qu’il se lie d’amitié avec des artistes comme Jean Tinguely (1925-1991), Yves Klein (1928-1962), Niki Saint Phalle (1930-2002), Martial Raysse (né in 1936). Dans un entretien accordé à Sylvie Couderc et publié dans le catalogue de l’exposition « Alain Jacquet. Œuvres de 1951 à 1998 » (Musée de Picardie) il dira que « ce contact avec le monde de l’art l’a définitivement décidé à devenir artiste ».
Proche de la Nouvelle figuration, très intéressé par l’esthétique et le discours véhiculé par le Pop Art, il entreprend un voyage à New-York en 1961. Il y rencontre les acteurs de la scène artistiques dont Andy Warhol (1928-1987), Roy Lichtenstein (1923-1997), Robert Rauschenberg (1925-2008). Lors de sa première exposition personnelle, en 1961 à la Galerie Breteau à Paris, il présente les Cylindres, des volumes sur lesquels il juxtapose des taches de couleurs vives. Ces œuvres préfigurent les Camouflages, qu’il réalise à partir de 1962, où s’entremêlent des images empruntées à l’histoire de l’art et des images issues de la culture populaire dans une juxtaposition de couleurs primaires et secondaires.
ƒ Alain Jacquet (1939-2008)
Camouflage Michel Ange, Chapelle Sixtine, la tentation d'Eve, 1962-63
Résultat : 466100 €
Exposés en 1963 à la Galerie Robert Fraser (Londres) et en 1964 à la Galerie Alexander Iolas (New York), les Camouflages assurent à Alain Jacquet une reconnaissance sur la scène artistique internationale. Parmi les œuvres de cette série vendue par PIASA en octobre 2019, l’œuvre intitulée « Camouflage Michel Ange, Chapelle Sixtine, la tentation d'Eve » en trouvant acquéreur à 466 100 euros a permis d’établir un record pour l’artiste en vente publique. Après quelques instants nécessaires à l’œil pour l’acclimater au délire chromatique, on distingue la puissance musculeuse du corps d’Adam saisissant le serpent envoyé pour tromper Eve.
Illustrant la multipolarité de l’héritage culturel de l’artiste, un pied en Europe, l’autre aux États-Unis, « Camouflage Michel Ange, "Sixtine chapel" V », vendu pour près de 300 000 euros rapproche l’anatomie classique d’une sculpture peinte et la statue de la Liberté.
ƒ Alain Jacquet (1939-2008)
Camouflage Michel Ange, "Sixtine chapel" V, 1963
Résultat : 296320 €
Si les grands noms de l’Histoire de la peinture tapissent littéralement la rétine de l’artiste, c’est également le cas de l’imagerie populaire comme en témoigne « Camouflage Walt Disney (Donald watching TV) » réalisé la même année. Adjugé pour plus de 270 000, l’œuvre reproduit une vignette de bande dessinée dans laquelle les personnages regardent la télévision. Mise en abime discrète, l’œuvre permet également de nous interroger sur le rapport de la société entretient avec les images.
ƒ Alain Jacquet (1939-2008)
Camouflage Walt Disney (Donald watching TV), 1963
Prix: 270200 €
Avec sa série des Images d’Épinal entamée en 1962, l’artiste poursuit son interrogation sur la frontière séparant figuration et abstraction, en perturbant la lecture de ces images populaires anciennes pour donner naissance à de très beaux et énigmatiques entrelacs colorés, qui frôlent la non-figuration sans toutefois s’y livrer pleinement.
L’œuvre intitulée « Image d’Epinal : L'Union entre la France et l'Autriche » date de février 1962. Elle s’est vendue pour plus de 80 000 euros.
ƒ Alain Jacquet (1939-2008)
Image d'Epinal: L'Union entre la France et l'Autriche, février 1962
Résultat : 81960 €
Preuve que son œuvre se caractérise par une grande diversité de médium et de technique, il présente pour le pavillon français lors de la Biennale de Venise de 1976 la baratte. Cette sculpture-installation, devenue iconique, est constituée de 64 disques superposés portant chacun les 64 signes de l’alphabet Braille, du I-ching et du système binaire, créant ainsi des combinaisons quasi infinies.
ƒ Alain Jacquet (1939-2008)
La Baratte (Churn), 1971-1975
Résultat : 81960 €




